Le cortège s?éloignait de la ville à pas presque fantomatiques, sortant de l?église où les gens étaient restés silencieux. Le long défilé, tout de noir vêtu, s?évanouissait dans une sorte de brouillard ; même le soleil restait froid, sans chaleur, il pleurait sans doute avec le cortège.
Marylène, cette jeune femme dans la trentaine presque achevée, était au premier rang, regardant devant elle le C25 noir, aux vitres tapissées d?un rideau rouge. Elle restait droite, se tenant accrocher à son désespoir comme à une cane ; le reflet de son visage un peu perdu était effacé dans la vitre du convoi mortuaire. Derrière elle, s?écoulait un long flot de proche, presque aussi long que les flots de larmes versées. Le temps des sanglots venait de se finir, il allait maintenant être temps de vraiment pleurer. Les cernes autour des yeux montraient que ses nuits étaient courtes. Depuis que l?être qu?elle aimait par dessus tout, était mort, elle ne pouvait ni ne pourrait dormir de tout son saoul. Le vin serait mélangé aux larmes, le diluant.
Certaines nuits, elle laissait échapper un ?il vers l?air extérieur, à travers la fenêtre ouverte et parfois convulsive :
Son pas filait doucement sur le bitume, ne laissant pas de traces, sauf lorsqu?il s?aventurait dans les tas de feuilles mortes, descendues des arbres tantôt.
Le jour, des jambes rapides, et au nombre de deux finement ciselées, parcouraient d?un bout à l?autre de la ville les rues et les agences A.N.P.E. ; ces endroits qui, malgré leur nom, vous apprennent à ne plus chercher un emploi et d?attendre patiemment le fin-de-droit arriver à la maison. Lorsqu?on poursuit incertain la déchéance, le pire c?est qu?on y tombe sans jamais pouvoir se relever, mais aller dire ça aux sociétés de sondage et aux administrations sociales, si lointainement portées par leurs chiffres et leurs ordinateurs. Ils sont calmement calés dans leurs fauteuils et leur chaud bureau, en oubliant que parfois derrière les chiffres, se cachet des êtres humains doués de langages, de mobilités, d?intelligences et parfois même de qualité appréciable dans le milieu du travail, lorsqu?on ne les empêche tout bêtement pas de travailler. Bien sûr, il est facile d?oublier. mais oublier quoi, après tout ; Rien !
Marylène tâchait d?oublier ses tracas du quotidien, et surtout l?inépuisable chagrin qui la gouvernait. Elle oubliait, courait dans les rues. Elle courait à travers les ruelles, comme pour percer la ville, et en faire couler un pus jaune fétide, traduction passive de la concentration consanguine qui sévit dans nos cités. Son pied renversait quelques boites qui, vides, roulaient jusqu?à se loger dans un caniveau dans un bruit aluminium, gémissement de tambour. Ses poumons laissaient couler une sombre bouffée d?air chaud, qui partait en fumée à chaque respiration saccadée.
Elle filait entre les gens et les voitures. Ses pas longs et aériens traçaient de gigantesques aérographies, ses pieds touchaient alternativement le sol et le ciel. Elle rebondissait. Ses cheveux se levaient comme des voiles d?un navire, se gonflaient. Ses vêtements s?envolaient comme de vastes feuilles d?arbre. Ses pas longs et souples s?enchaînaient. Ses poumons brûlaient ses côtes.
Au bout de quelques kilomètres, elle était comme une vaste machine à vapeur, soufflant, crachant, lézardant le ciel de son haleine chaude. Sa sueur s?évaporait, mouillait son aîne. Quelques gouttes se laissaient prendre au vent, puis s?éparpillaient dans le flot vaste de l?air libre.
Marylène, cette jeune femme dans la trentaine presque achevée, était au premier rang, regardant devant elle le C25 noir, aux vitres tapissées d?un rideau rouge. Elle restait droite, se tenant accrocher à son désespoir comme à une cane ; le reflet de son visage un peu perdu était effacé dans la vitre du convoi mortuaire. Derrière elle, s?écoulait un long flot de proche, presque aussi long que les flots de larmes versées. Le temps des sanglots venait de se finir, il allait maintenant être temps de vraiment pleurer. Les cernes autour des yeux montraient que ses nuits étaient courtes. Depuis que l?être qu?elle aimait par dessus tout, était mort, elle ne pouvait ni ne pourrait dormir de tout son saoul. Le vin serait mélangé aux larmes, le diluant.
Certaines nuits, elle laissait échapper un ?il vers l?air extérieur, à travers la fenêtre ouverte et parfois convulsive :
Le lampadaire laissait échapper sa lueur qui s?évanouissait un peu au contact du
sol, se fragmentait au touché du plafond et vagabondait dans la rue et la
chambre. Le puzzle ainsi formé permettait à quelques passants, qui marchaient,
d?avoir pour fidèle compagne leurs ombres. Elle s?échappait pourtant, pour les
rejoindre au lampadaire suivant. Une silhouette se déplaçait frileusement
recouverte d?un manteau poussiéreux et d?un petit chapeau un peu gonflé, posé en
arrière et penché sur la tête de son propriétaire.
Son pas filait doucement sur le bitume, ne laissant pas de traces, sauf lorsqu?il s?aventurait dans les tas de feuilles mortes, descendues des arbres tantôt.
Le jour, des jambes rapides, et au nombre de deux finement ciselées, parcouraient d?un bout à l?autre de la ville les rues et les agences A.N.P.E. ; ces endroits qui, malgré leur nom, vous apprennent à ne plus chercher un emploi et d?attendre patiemment le fin-de-droit arriver à la maison. Lorsqu?on poursuit incertain la déchéance, le pire c?est qu?on y tombe sans jamais pouvoir se relever, mais aller dire ça aux sociétés de sondage et aux administrations sociales, si lointainement portées par leurs chiffres et leurs ordinateurs. Ils sont calmement calés dans leurs fauteuils et leur chaud bureau, en oubliant que parfois derrière les chiffres, se cachet des êtres humains doués de langages, de mobilités, d?intelligences et parfois même de qualité appréciable dans le milieu du travail, lorsqu?on ne les empêche tout bêtement pas de travailler. Bien sûr, il est facile d?oublier. mais oublier quoi, après tout ; Rien !
Marylène tâchait d?oublier ses tracas du quotidien, et surtout l?inépuisable chagrin qui la gouvernait. Elle oubliait, courait dans les rues. Elle courait à travers les ruelles, comme pour percer la ville, et en faire couler un pus jaune fétide, traduction passive de la concentration consanguine qui sévit dans nos cités. Son pied renversait quelques boites qui, vides, roulaient jusqu?à se loger dans un caniveau dans un bruit aluminium, gémissement de tambour. Ses poumons laissaient couler une sombre bouffée d?air chaud, qui partait en fumée à chaque respiration saccadée.
Elle filait entre les gens et les voitures. Ses pas longs et aériens traçaient de gigantesques aérographies, ses pieds touchaient alternativement le sol et le ciel. Elle rebondissait. Ses cheveux se levaient comme des voiles d?un navire, se gonflaient. Ses vêtements s?envolaient comme de vastes feuilles d?arbre. Ses pas longs et souples s?enchaînaient. Ses poumons brûlaient ses côtes.
Au bout de quelques kilomètres, elle était comme une vaste machine à vapeur, soufflant, crachant, lézardant le ciel de son haleine chaude. Sa sueur s?évaporait, mouillait son aîne. Quelques gouttes se laissaient prendre au vent, puis s?éparpillaient dans le flot vaste de l?air libre.
Libre.
Libre, elle se trouver enchaîner à ce maudit souvenir, à cet éc?urant passage éphémère de l?être aimé : Son fils.
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