03 janvier 2001

Pirates et corsaires : l'épopée des écumeurs des mers

Depuis l'Antiquité, ils suscitent crainte et admiration. Leur aventure est pétrie de légendes. Historia fait la part du rêve et de la réalité.
Par Sergio Eltéca
Thucydide mentionnait déjà  l'existence de pirates sur les mers, vingt-quatre siècles avant les hackers , ces nouveaux forbans des flux informatiques. A quand remonte le phénomène ? Probablement aux premières embarcations, et Noé dut peut-être à  la protection divine la grâce de voir son arche épargnée des pirates.

BrasilSans amarres, le pirate ! Point de famille qui ancre l'honnête homme à  la routine. Point de famille mais tant de femmes à  butiner, au sens propre si l'on peut dire : le sexe faible fait partie intégrante du butin et le flibustier ne s'embarrasse pas de l'accord de ses proies. Si le pirate ne fait pas de vieux os dans les draps nuptiaux, il ne se complaît pas davantage dans les plis d'un drapeau. En rupture avec la société, il court les mers pour son propre compte et ne s'associe avec ses frères de la côte qu'au gré des coups de main. Rhum, petites pépées et paysages de rêve : l'image du pirate est celle du jouisseur sans entraves.
Et si les femmes veulent vivre l'aventure, qu'elles se travestissent en homme, comme le montre l'histoire d'Ann Bonny et de Mary Read. Quelques risques, tout de même, à  s'affranchir de tout lien pour vivre pleinement, et la bannière des pirates, avec ses deux tibias entrecroisés sous un crâne, annonce clairement que ces mauvais bougres redoutent peu l'ultime maîtresse.

L'imagerie fait la part belle aux fantasmes : au cinéma ( Pirates de Polanski), dans la littérature ( L'Ile au trésor de Stevenson), le pirate se présente comme un homme libre, affranchi du carcan des lois et des pesanteurs terrestres. A la fois Dieu et maître sur son navire, il ne pose le pied - ou la jambe de bois - que pour aborder de nouveaux mondes, des contrées idylliques peuplées de splendeurs inconnues et d'indigènes exotiques. Boucle d'oreille, tête coiffée d'un foulard, perroquet sur l'épaule : le folklore du pirate rebelle a probablement inspiré bien des adolescents, des hippies aux lobes percées et drapés d'étoffes bariolées jusqu'aux punk avec leur rat sur l'épaule.
Pavillon RobertsDans la bande dessinée, le personnage d'Hugo Pratt, Corto Maltese, incarne à  merveille l'aspect libertaire du pirate : toujours à  la découverte de nouveaux continents (géographiques ou oniriques), cet aventurier affranchi des lois et de la morale ne suit que son éthique, toute personnelle. La réalité est évidemment différente, et les témoignages historiques nous rapportent la cruauté et la sauvagerie des pirates : véritables requins pour les marins, ce sont des prédateurs de haute mer. Il faudra toute l'hypocrisie des nations pour blanchir le pavillon noir et donner quelque honorabilité aux rapines des pirates pour les transformer en exploits de corsaires. Le pirate n'obéit qu'à  son bon vouloir, le corsaire accepte l'autorité momentanée d'un roi qui utilise ce mercenaire, ce chien de mer, pour exécuter ses basses oeuvres.De nos jours, la sanglante saga de la piraterie continue sur mer, même si quelques sinistres cousins des flibustiers ont pris la voie des airs avec les détournements d'avion. Mitraillettes et appareillage électronique dernier cri remplacent sabres et pétoires, les trésors dérobés ne se comptent plus en doublons mais en tonnes de pétrole ou en lingots d'aluminium. La sauvagerie, elle, est restée la même.

[FDLC2K1] - Ombres

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