16 décembre 2006

L'enfant du massacre

Elle joue avec ses cerceaux au dessus des volcans, dans des hurlements de loups échappés d'un commissariat. Elle détourne son regard, un instant, pour s'en retourner à ses jeux. La danse du soir commence son tour, au tour d'elle, et étreint son ombre. La nuit la kidnappe, la serre fort, très fort, trop fort.
Elle s'échappe comme ça, comme le vent baigné du printemps, d'un pas agile mais fragile. Elle se relève et courre au près de son cerceau qui s'envole toujours plus loin, toujours plus vite. Il déboule d'entre les maisons de la casbah, cherchant une impasse où s'arrêter, mais ne trouvant pas, il roule, suivant la pente. Ses pas le suivent essoufflés, des pas rapides et allongés, des plus courts et plus rapides, des lents mais bien plus longs, des pas qui saccadent cette course. Suivant toujours une ligne tracée, le cerceau efface l'horizon, pour devenir l'horizon lui même, Sans lui, elle n'est plus rien qu'une poupée à la jupe déchirée, petite soeur naturelle de Pinocchio, à la peau au même ton boisé, au sourire qui ne meurt jamais, à la larme qui lave la terre, et aux mains si dures, qu'elles semblent semblent déjà tanner par le travail.
Le cerceau poussé par le vent furieux traverse encore une rue, une ruelle, un square aux ombres étourdis, un chalet qui n'aurait pas dû être là, une toiture dévastée, un paravent chinois aux dames brodées d'or. Puis s'arrête, là comme ça, pour rien, pour elle surtout, et tombe à terre. Ses doigts viennent le rattraper lui, l'audacieux qui voulait s'échapper. Il a traversé l'artère.
Elle tend ses doigts noirs et moite sur ce morceau de bois, qui fut en vie un instant pour retirer un couteau sous la gorge d'une enfant. Il s'est sauvé, pour la sauver.

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